Des poésies, pourquoi?  

Mon alter égo

se hérisse en ta présence

tant tu me fais peur.

© Nyuka Anaïs Laurent   11.09.06

Des poésies, pourquoi?

Ceci est une opinion personnelle.  La définition qui suit est mienne et il se pourrait que mon interprétation du style japonais soit fausse ou incomplète, mais pour moi, un haïku est une forme de poésie japonaise de 3 lignes de 5, 7 et 5 syllabes qui met en relief une chose du monde naturel et la met en contraste ou la compare à un sentiment ou une description humaine.  Si peu de mots (17 petits syllabes) pour dire tant de choses qui peuvent être interprétées de tant de manières!  N'est-ce pas beau? Mais dur à écrire!!!

Alors, vous me demandez, si c'est si dur, si c'est tant de travail à faire, des poésies, pourquoi?

La poésie a toujours été, de tout temps, la manière la plus concise à exprimer ses pensées, ses émotions, sa philosophie et son âme.  La poésie est une maîtresse bien jalouse de notre temps et de notre talent. Elle demande le meilleur de notre capacité à nous exprimer. Elle ne nous lâche pas si un mot, une phrase ne dit pas exactement ce que nous voulions dire. Nous en rêvons la nuit et nous nous levons pour l'écrire au moment où l'inspiration nous jaillit, faute de quoi elle est perdue à jamais. En même temps, elle met en place des limites, des structures et des règles comme autant de défis à notre talent, puis elle ajoute le besoin de rimes et de rythmes pour nous confondre!  Alors même les poètes se demandent, des poésies, pourquoi?

Parce que le mot poétique nous donne des ailes. Parce que la poésie nous donne l'impression que nous donnons un cadeau digne de la personne pour qui le poème est écrit. Parce que la poésie nous permet de dire ce que nous ne pouvons pas dire en conversation ordinaire, avec des mots anodins, avec une personne en face de nous qui nous jugera, peut-être même nous rira au nez. Parce que la poésie est une forme plus élevée, pourquoi pas le dire, plus élite, de la communication qui utilise le mot juste, qui arrive à exprimer le sentiment si difficile à capturer, qui nous apporte une satisfaction presque jouissive quand elle apparaît sur une page vierge, blanche comme la neige, que nous dépucelons tendrement, avec amour et respect.

La poésie c'est une des seules manières de se forcer à donner tout ce que nous sommes pour exprimer tout ce que nous ressentons de manière la plus éloquente dans un monde devenu de plus en plus stérile, rigide et autoritaire et où nous sommes, malgré tous les jouets modernes qui sont supposés nous permettre de communiquer facilement, de plus en plus isolés les uns des autres.  Les maux, les malaises de l'époque moderne, l'anxiété, la dépression et l'angst ont peur de la poésie ou au contraire, l'utilisent comme soupape de sécurité...

Alors, si elle est si précieuse, pourquoi meurt-elle? Justement parce qu'elle est si difficile à créer et à comprendre, si personnelle qu'elle fait peur aux autres car elle ne nous permet pas d'échapper au monde intime du poète, et puis, elle nous défie intellectuellement de comprendre le sens voulu de l'auteur... chose parfois difficile en soi, car la poésie peut être vague, voilée ou volontairement abstraite.

Le lecteur n'est pas l'écrivain, c'est à dire, il n'a pas la même base d'expériences, ni d'émotions, ni de pensées... comment donc, comprendre tout à fait ce que le poète a voulu dire?  Ce qui nous touche nous pensons comprendre. Là où les mots nous paraissent clairs nous pensons comprendre. Mais la beauté de la poésie réside justement dans cette ambigüité et cette possibilité de toujours être autre ou plus que ce que l'on croit.  Elle surprend. Elle nous invite à être profondément honnête, nu face à ce sacrifice de se donner totalement et à savoir accepter ce cadeau extraordinaire.  Elle nous suggère de nous dévoiler nous-mêmes.  Elle est romantique et coquette. Elle, elle a mille et une voiles et nous lui devons mille et une nuits pour les ôter, tout en savourant chaque couche de plus en plus précise de sa beauté!

© Nyuka Anaïs Laurent      le 11 septembre 2006